La réduction du nombre d’élèves en CP, une bonne idée ?
Le temps politique n’est décidément pas compatible avec le temps long de l’éducation ! Un mandat présidentiel vient de s’achever, un autre s’ouvre et c’est de nouveau une valse de mesures qui modifient voire annulent ce qui était en train de se mettre en place et avant même qu’on en ait pu mesurer les effets : retour pour beaucoup à la semaine de 4 jours en premier degré, probable extinction progressive du dispositif « plus de maîtres que de classes » au profit des CP à douze élèves, diminution pour ne pas dire disparition des EPI en collège (enseignements pratiques interdisciplinaires), rétablissement des classes bi-langues, etc.
Réduction à 12 du nombre d’élèves en CP dans les zones prioritaires : qui serait contre ? L’intuition première nous convainc qu’on s’occupe mieux d’un petit groupe d’élèves que d’une classe nombreuse, et ce n’est sûrement pas faux. Mais à condition de ne pas faire classe de la même manière, de modifier la pratique pédagogique : que je sache, cela n’a pas été vraiment pris en compte. Les études scientifiques ne sont pas toutes concordantes pour encourager ce dispositif, mais elles montrent aussi que les bénéfices peuvent très vite disparaître si ce petit nombre d’élèves n’est pas maintenu en CE1 voire CE2. C’est donc un dispositif qui va coûter très cher, et le prix en est de supprimer à terme un autre dispositif : « plus de maîtres que de classes ». L’avis du CESE « les inégalités à l’école » (2011) dont j’avais été le rapporteur avait préconisé la mise en place de ce dispositif, pratiqué en Finlande par exemple et qui y donne de bons résultats, puis d’en mesurer l’efficacité ; l’avis du CESE sur la loi d’orientation de 2013 se félicitait que cette loi le mette en place. Le bénéfice est double : aider au sein même de la classe l’élève qui en a besoin au moment où il en a besoin, sans ralentir le reste de la classe, et ne pas attendre que la difficulté s’aggrave au point de le mener à l’échec. D’autre part, cela induit d’autres manières d’enseigner, une adaptation constante aux besoins des élèves, des échanges de pratiques permis par la présence de cet enseignant intervenant ainsi au côté de plusieurs collègues de son école. La formation continue est déjà insuffisante dans ce secteur pour qu’on se prive d’un tel vecteur !
Faut-il sonner le glas du « plus de maîtres que de classes » ?
Je le crains, alors même que ce dispositif commençait à prendre sa vitesse de croisière, que les enseignants concernés l’estimaient profitable, et qu’une évaluation aurait été possible.
Plus grave : ces constants zig-zag renforcent tous ceux qui renâclent à changer quoi que ce soit, estimant qu’il est vain d’appliquer une réforme puisqu’il suffira d’attendre la suivante…
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