Les groupements d’employeurs : une réponse prometteuse aux transformations du travail et de l’emploi ?

Le marché du travail français est marqué par une dualité : 85 % de nos emplois sont en CDI mais 90% des embauches sont en contrat court. Coexistent ainsi des emplois stables et des emplois précaires, voire très précaires (1/3 des CDD durent une journée ou moins !), c’est un des premiers chiffres que j’ai constaté en tant que rapporteur du CESE pour la section du Travail et de l’emploi sur le sujet  « Les groupements d’employeurs ».

Des mutations des modèles organisationnels des entreprises sont également à l’œuvre avec l’apparition de nouvelles activités économiques ou encore l’automatisation qui auront nécessairement un impact sur le contenu du travail et la valorisation de nouvelles compétences.

Dans cet environnement toujours difficile, les groupements d’employeurs qui sont crédités depuis leur origine, de la possibilité de faire émerger des emplois stables ou de consolider des emplois précaires, suscitent l’intérêt des pouvoirs publics et de certains milieux économiques et sociaux. Nous avons noté dans la section que cette formule d’emploi reste peu connue, perçue – parfois – comme expérimentale voire stigmatisée et assimilée à une externalisation d’une fonction de ressources humaines.

Investir et réussir dans des projets entrepreneuriaux portés par les groupements nécessite de remplir trois conditions.

La première est de créer les conditions de la confiance. Un des enjeux du groupement est de révéler des besoins d’emplois partiels ou intermittents dans de petites entreprises en surmontant leur prévention à l’embauche grâce à la possibilité de porter les contrats de travail et la responsabilité d’employeur par le groupement. Tel est le sens de notre préconisation qui vise à construire un outil numérique collaboratif, au niveau des territoires, pour recenser les besoins d’emplois à temps incomplet pouvant donner lieu à des consolidations sur la base de temps pleins partagés.

Valoriser le rôle du groupement d’employeurs dans la montée en qualification des personnes et l’adaptation aux évolutions des métiers et aux attentes des entreprises constitue une réelle plus-value !

La deuxième condition est de consolider le pacte de solidarité entre les entreprises adhérentes.

La faible capacité contributive des entreprises adhérentes est un facteur de fragilité, notamment lorsque ces groupements sont de petite taille et visent des entreprises elles-mêmes de petite taille.

Dans l’avis « Les groupements d’employeurs » que j’ai porté, le CESE préconise une réflexion sur la mise en place d’un fonds mutuel de garanties professionnelles, ainsi qu’un accompagnement des phases de croissance. Un « fonds d’amorçage » pourrait être créé pour inciter à la création de groupements d’employeurs dans les secteurs d’activités où les emplois sont saisonniers et/ou à temps partiel. Enfin, une réflexion sur la TVA permettrait de mieux associer des structures adhérentes publiques et privées.

La troisième et dernière condition est de favoriser l’innovation dans le cadre du dialogue social.

Ouvrir l’espace du dialogue social au niveau des branches fortement utilisatrices de contrats courts permettrait de sécuriser les parcours professionnels. De manière générale, des clauses spécifiques « groupements d’employeurs » pourraient être négociées dans les conventions collectives, en faveur du développement d’activités et d’emplois stables et de qualité (CDI, temps plein, formation et qualification, mobilité des salariées et des salariés…).

Forme d’emploi respectueuse du bien être des salariés et des besoins des entreprises, les groupements constituent un réel levier d’emploi et de croissance…Souhaitons que les pouvoirs publics, les branches professionnelles et les entreprises en fassent un des éléments d’une stratégie pour un emploi stable et qualifié !