États généraux de l’alimentation : où sont passés la pêche et l’aquaculture ?

Pourquoi les États Généraux de l’Alimentation ne traitent ils pas de la pêche et de l’aquaculture ? Le CESE s’interroge après son avis sur l’aquaculture voté le 13 Juin.

En 50 ans, la consommation de produits aquatiques dans le monde est passée de 10 kg à près de 20 kg par an et par être humain. A la vitesse à laquelle croît la population mondiale, l’aquaculture est devenue incontournable : elle dépasse d’ailleurs désormais la pêche en volume.
Avec 34 kg consommés par an et par tête, la France bat des records. Elle fait partie des plus grands consommateurs de produits aquatiques. Or, 86% d’entre eux sont importés. Cela représente un gigantesque déficit commercial pour le pays : 3,7 milliards d’euros en 2015 qui s’accroît de plus de 100 millions d’euros par an. Pourtant la France bénéficie d’atouts indéniables : des zones littorales très étendues, de nombreux cours d’eau et étangs ainsi qu’une grande diversité climatique, ce qui permet l’élevage d’un large éventail d’espèces endémiques. Depuis 20 ans, aucune entreprise de pisciculture marine n’a été créée en France, alors que nous exportons plus de 100 millions d’alevins vers des pays, qui vont les élever et les renvoyer sur nos étals, captant toute la valeur ajoutée.

Parmi les freins au développement de l’aquaculture, nos concitoyen.ne.s ne disposent que de très peu d’informations concernant la provenance de ces produits, notamment quand ils sont intégrés dans des plats cuisinés.

Qui connaît les principales espèces concernées par l’aquaculture (huîtres, moules, crevettes, saumons, truites, bars, turbots, daurades, …) et leurs conditions d’élevage ?

Dans de nombreuses fermes piscicoles marines et continentales, l’alimentation par exemple provient de poissons sauvages issus de la très décriée pêche minotière, une pêche industrielle intensive destinée à alimenter les filières industrielles.
Face à cette situation, le CESE propose de saisir une opportunité : développer la filière aquacole en France et opter pour une stratégie inspirée par l’approche écosystémique et la mise en place d’une véritable traçabilité des produits. Ce développement permettrait à la fois de réduire notre dépendance aux importations, mais aussi de pérenniser et développer les emplois générés sur les territoires.

Cette nouvelle stratégie, qui doit s’appliquer aussi bien dans l’Hexagone que dans les Outre-mers, exige une volonté et un portage politiques affirmés à tous les niveaux. Elle suppose aussi des innovations que la qualité de notre appareil de recherche rend tout à fait possibles. Ainsi, l’aquaculture peut devenir complémentaire à la fois de la pêche — en préservant les ressources halieutiques au lieu de les dégrader — et de l’agriculture. La prise en compte du lien terre-mer est primordial. La qualité et quantité de l’eau est le véritable frein naturel au bon développement de l’aquaculture. L’équilibre des écosystèmes et sa reconquête sont en jeu. Rien de moins.

L’aquaculture s’inscrit aussi dans des projets de développement territorial, avec des emplois qualifiés et non délocalisables. Dans le pays, en 2014, on recense 3 377 entreprises aquacoles, qui représentent 18 400 emplois directs (dont 25% en Outre-mer).

Il devient nécessaire de soutenir les professionnels en facilitant leurs démarches administratives pour créer, développer et transmettre leurs entreprises. Une solution : instituer notamment un fonds de garantie aquacole et réorienter une partie des aides publiques européennes vers ce secteur.

Mais rien ne sera possible sans impliquer pleinement et rassurer les consommateur.rice.s en demande d’une alimentation saine et durable. Elle.Il.s souhaitent des produits halieutiques d’origine française de préférence locale, sains et durables.

Le CESE recommande donc de rendre obligatoire un étiquetage indiquant l’origine des produits aquatiques frais et de ceux intégrés dans les plats cuisinés pour assurer ainsi une réelle traçabilité, ainsi qu’une remise à plat des labels et signes de qualité existant avec une composante écologique.

A l’occasion des États généraux de l’alimentation, nous appelons le gouvernement à placer l’aquaculture française au centre de cette réflexion afin de réussir une transition vers un modèle plus durable et transparent, ce que demandent fortement les consommateur.rice.s français.e.s.

« Les fermes aquacoles marines et continentales : enjeux et conditions d’un développement durable réussi »